La littérature catalane à l’honneur!

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Après Genève, Port-au-Prince et Paris, c’est au tour de la Barcelone littéraire d’être mise en vedette lors de cette 24eédition. Pour l’occasion, le FIL accueille à Montréal une délégation de quatre auteurs, huit artistes et autres invités spéciaux catalans. Plusieurs liens se sont tissés entre le festival et la Catalogne ces dernières années — l’an dernier, l’écrivain Miquel de Palol nous avait visités et en 2016, l’auteur Sebastian Alzamora avait été l’un des invités internationaux de l’événement — et ce mini-festival catalan est en quelque sorte l’aboutissement de cette solide amitié, qui s’incarne dans douze activités illustrant la variété et la richesse de la littérature en Catalogne, présente dans diverses disciplines.

Afin de découvrir un peu plus cette littérature et quelques-unes de ses particularités, j’ai eu le plaisir de m’entretenir avec Izaskun Arretxe, directrice générale, et Julià Florit, directeur culturel de l’Institut Ramon Llull, un organisme créé en 2002 en vue de promouvoir la langue et la culture catalanes à l’international à travers l’organisation de cours de catalan (offerts dans 115 universités à travers le monde), d’examens et de certificats de langue (le catalan est parlé par environ dix millions de personnes dans le monde), de soutien aux travaux d’artistes et de chercheurs, et enfin de bourses de traduction.

 

FIL : Comment pourrait-on qualifier la littérature catalane, en quelques mots?

Izaskun Arretxe : D’abord, il faut dire que la littérature catalane possède une riche histoire et une longue tradition. L’Institut pour lequel nous travaillons est nommé en l’honneur de Ramon Llull, philosophe et auteur majorquin du… XIIIsiècle! Il est notre Cervantès, si on veut. Notre littérature prend donc ses racines au Moyen-Âge et malgré plusieurs embûches, elle continue d’être vivante et vibrante, grâce notamment à l’apport d’auteurs contemporains exceptionnels.

 

FIL : À quels types d’embûches faites-vous référence?

Izaskun Arretxe : D’abord, sous le régime Franco, il était interdit de parler le catalan en public, de publier des livres en catalan ou d’aller voir une pièce de théâtre dans laquelle on parlait le catalan. Heureusement, en 1978, la langue est redevenue officielle en Catalogne et dans les Îles Baléares.

Ensuite, le catalan cotoie géographiquement une langue forte et hégémonique : l’espagnol. Elle est donc « en compétition » avec elle, et ce à plusieurs niveaux. Par exemple, les auteurs catalans se demandent encore s’ils vont écrire leur prochain livre en espagnol, pour obtenir une meilleure diffusion, ou en catalan, dans leur langue.

Julià Florit : J’ajouterai qu’à cette époque où le catalan était interdit, la langue était devenue non seulement un véhicule pour s’exprimer, mais aussi un instrument politique, voire un outil de résistance. Les gens et auteurs qui écrivaient en catalan luttaient ainsi contre cette interdiction.

 

FIL : Ici, au Québec, il existe une réelle volonté, dans nos librairies, d’offrir aux lectrices et lecteurs des œuvres québécoises; est-ce que vous vivez une situation semblable chez vous?

Izaskun Arretxe : Cela dépend des librairies. En Catalogne, nous avons un immense réseau de petites et de moyennes librairies; presque chaque village ou petite ville possède la sienne et on y retrouve en effet une vaste collection de romans d’auteurs catalans ou traduits en catalan. Dans les grandes chaînes, nos auteurs sont moins présents. Ce n’est pas par mauvaise volonté, à mon avis, c’est seulement parce qu’il existe une très vaste offre d’auteurs espagnols et étrangers. Ce n’est donc pas une question politique, mais une situation purement économique, liée aux marchés.

Julià Florit : De plus, il faut savoir que la Catalogne possède une littérature jeunesse extrêmement vivante, de très nombreux titres sont publiés chaque année, alors les jeunes Catalans sont mis en contact avec leur littérature nationale dès leur entrée à l’école.

 

FIL : Comme c’est l’un des mandats de votre Institut, j’aurais envie de vous entendre parler du rayonnement de la littérature catalane.

Izaskun Arretxe : C’est une littérature qui voyage bien, mais qui est soumise aux conditions difficiles de la traduction, que tous les éditeurs connaissent. Ce n’est pas si facile pour un auteur hongrois ou finlandais d’être traduit pour être lu à l’étranger et c’est la même chose pour nos auteurs. Cela dit, notre Institut, grâce notamment à des bourses, a contribué à une meilleure diffusion de notre littérature. Bon an, mal an, 150 livres catalans sont traduits et diffusés à l’étranger.

Julià Florit : Il y a plusieurs choses à dire à ce sujet. Il faut souligner le dynamisme exceptionnel de nos agentes littéraires (ce sont toutes des femmes!), qui travaillent très fort pour vendre des droits à l’étranger. Ensuite, c’est triste à dire, mais le conflit catalan nous a mis sur la map, internationalement. Avant, il fallait d’abord expliquer qui nous étions, voire où nous étions situés sur le globe; aujourd’hui, nous n’en sommes plus là : les gens sont davantage curieux de la Catalogne et nous pouvons nous consacrer à parler de notre littérature plutôt que de notre existence comme peuple. Enfin, nos participations répétées à des foires internationales comme Paris, Guadalajara et surtout Francfort nous ont permis de nous faire connaître par des éditeurs étrangers.

Izaskun Arretxe : La littérature catalane a été l’invitée d’honneur de la Foire du livre de Francfort en 2007 et pour nous, il y a eu un avant et un après Francfort. Cette reconnaissance a permis à notre littérature d’être perçue comme étant « normale » (rires). Maintenant, aux yeux du monde, nous ne sommes plus une littérature « régionale ».

Julià Florit : Seulement en Allemagne, il s’est traduit dix fois plus de romans catalans en 2007 que lors de l’année précédente…

 

FIL : En terminant, une question impossible : si je vous demandais de choisir trois ou quatre livres d’auteurs catalans pour nous permettre de découvrir votre littérature… 

Izaskun Arretxe et Julià Florit : (rires)

Izaskun Arretxe : Ah lala… Allons-y avec des auteurs contemporains, qui sont plus faciles à trouver de nos jours en librairie. Je débuterais par Gloire incertaine de Joan Sales. Le livre a été publié en français chez Gallimard il y a longtemps, mais on publiera une nouvelle traduction chez Actes Sud en octobre.

https://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature/gloire-incertaine?destination=node%2F65842

Julià Florit : Chez Robert Laffont, en février prochain, sera publiée la traduction de Irmão de gelo (Frères de glace) de la jeune auteure de 36 ans Alicia Kopf.

https://www.theguardian.com/books/2018/may/09/brither-in-ice-alicia-kopf-review

Izaskun Arretxe : Enfin, impossible de passer à côté de Confiteor, de Jaume Cabré (Actes Sud). Notre auteur le plus traduit : on peut le lire en 36 langues!

https://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature-etrangere/confiteor

 

FIL : Merci à vous deux et bon séjour à Montréal!

 

 

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La Catalogne à l’honneur au FIL 2018 :

Ce soir

19 h 30

Barba Corsini– Concert de poésie et de musique électronique

Café de l’Usine C

http://www.festival-fil.qc.ca/barba-corsini/

 

Lundi 24 septembre

19 h

Des fleurs pour Mercè Rodoreda

S­alle Claude-Léveillée de la Place des Arts

http://www.festival-fil.qc.ca/des-fleurs-pour-rodoreda/

 

Samedi 29 septembre

16 h

Sol Picó danse les mots d’Imma Monsó

Usine C

http://www.festival-fil.qc.ca/sol-pico-danse-les-mots-dimma-monso/

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